Quels types de jeux favorisent les compétences sociales et émotionnelles des enfants ?

Les cours de dessin, de musique, le sport et bien d’autres activités « académiques » sont reconnues pour leur apport dans le développement créatif et moteur des enfants. Si parfois, en tant qu’adultes, nous avons peur que nos enfants s’ennuient et privilégions les activités encadrées, nous souhaitons dans cet article au contraire mettre en lumière l’apport des jeux libres dans le développement des enfants.

Des bienfaits de l’ennui et des jeux libres.

Souvent, nous adultes agissons avec les enfants comme avec nous-mêmes et pris dans notre course à la productivité, nous souhaitons « rentabiliser » le temps des enfants comme le nôtre.

Or, le vide est essentiel pour les enfants… comme pour les adultes parfois, mais les enfants ont le luxe de ne pas encore culpabiliser de perdre leur temps ! C’est dans ce vide que les enfants développent leur propre sens du jeu et par là-même une multitude d’autres compétences indispensables qu’ils acquièrent ainsi naturellement. Le jeu est le boulevard du développement dans lequel l’enfant apprendra une bonne partie des compétences essentielles à la vie.

Chaque nouveau jeu auquel s’adonne un enfant « joue » un rôle dans son développement. D’ailleurs, des études en psychologie de l’enfant ont montré que les enfants rechercheront naturellement les types de jeux dont ils ont besoin, à tout moment de leur développement. Le jeu est pour les enfants un véritable apprentissage, tout autant qu’un divertissement.

Dans cet article, nous passons en revue les différents types de jeux et ce qu’ils apportent en termes de développement. Par développement, nous entendons différentes compétences telles que la communication, la confiance en soi, l’empathie, l’écoute, tout ce qui est généralement inclus dans l’intelligence émotionnelle. A savoir le fait de réussir à prendre conscience de ses émotions pour mieux les apprivoiser. Elles sont plus difficiles à cerner et à évaluer que la grammaire ou les mathématiques, ou encore des compétences techniques, pour autant elles sont une base nécessaire à la construction du bien être de tout à chacun.

Avec du temps et l’environnement approprié, les enfants seront libres de s’engager dans ces différents types de jeu dont ils ont besoin pour grandir.

 

Le jeu autonome

Souvent, lorsqu’un enfant joue seul, en tant qu’adultes nous avons tendance à intervenir et à lui proposer telle ou telle activité qui nous semble utile ou productive, comme faire un dessin par exemple, tant nous sommes imprégnés de l’idée qu’il faille « faire » quelque chose. 

Or Il y a tellement de bénéfice à jouer seul, peu importe le jeu. Et souvent, nous prenons pour de l’ennui ce qui en réalité est un moment que l’enfant se consacre à lui-même et par là-même lui permet de faire des expériences et déployer sa créativité.

Lorsque les enfants jouent seuls, ils s’entrainent à développer certaines compétences comme l’assertivité, la confiance en soi. C’est aussi un moment pour développer sa propre identité, sans être confronté au regard des autres. Le fait de jouer seul et de prendre en charge quelque chose soi-même, d’aller jusqu’au bout de son idée seul, sans l’intervention d’un adulte, permet d’acquérir de la confiance en soi. C’est le moment où l’enfant, seul avec sa propre compagnie, prend conscience qu’il est capable de réaliser quelque chose par lui-même, de mettre ses idées en action. De ce moment découle une grande satisfaction personnelle à réaliser ses capacités d’autosuffisance. La confiance en soi qui s’acquiert à cet instant par le jeu solitaire jette des bases solides pour des relations saines qui seront bénéfiques tout au long de la vie.

Quelques exemples de jeux autonomes : les puzzles (Puzzles Londji), les jeux de construction (blocs ou planchettes) (Goki, Vilac), les circuits de billes (Plico), les loisirs créatifs…

Le jeu “désordonné”

Par jeu désordonné, nous entendons le fait de jouer avec des éléments à portée de main, dans la nature ou autre. Lorsque l’enfant manipule et s’approprie différents matériaux comme, le sable, la boue, la saleté, pour n’en citer que quelques-uns, il fait de nouvelles expériences sensorielles. Ce contact autonome avec ces éléments différents et surprenants lui permet de renforcer ses capacités de traitement sensoriel et nerveux. L’exposition à de nombreuses expériences sensorielles, qui ne soient pas forcément encadrées (mais néanmoins observées par souci de sécurité, bien entendu !) aide le cerveau des enfants à s’adapter aux futures expériences qu’ils vivront à l’école et dans d’autres environnements.

Ici, pas d’exemple puisque tout ce qui est à portée de main, notamment dans la nature, peut servir à jouer ! En complément, on peut proposer à l'enfant des éléments de jeu libre, sans règle du jeu, comme ceux de la marque Grapat

Jeu sensoriel

Dès les premiers instants, même bébés, les enfants utilisent leurs sens pour explorer et recueillir des informations sur le monde dans lequel ils s’épanouissent. Les activités sensorielles favorisent la construction d'importantes voies neurologiques qui les aideront à naviguer à travers les lieux, les odeurs, les sons, les goûts et les textures du monde qui les entoure et ce tout au long de leur vie.

Le jeu sensoriel peut également se révéler extrêmement apaisant et aider à réguler le système nerveux des enfants.

Le fait d’être en contact avec différents types de jeux sensoriels permet aux plus petits d’affiner leur capacité de découvertes. Cette multitude de stimuli sensoriels aide le cerveau des bébés à créer des connexions plus solides afin d'acquérir des compétences précieuses, telles que la capacité de filtrer les entrées sensorielles déjà connues afin de se concentrer sur un nouveau stimulus en particulier.

Quelques exemples : les jeux d’éveil musical (Nina&Miles), les balles de préhension en caoutchouc (Hevea) ou en bois (Plan Toys), les livres en tissu (Franck & Fisher), la boîte conteuse d’histoires (Joyeuse)

Les jeux d’imitation

Le jeu d’imitation permet aux enfants d’essayer différents rôles et personnalités et de travailler des situations du monde réel, dans un environnement sans menace et sans pression.

Les jeunes enfants n'ont pas encore la capacité de réfléchir sur leurs propres pensées et émotions ; le jeu d’imitation est donc un moyen privilégié d'explorer leurs propres pensées et émotions en s’appuyant sur des situations du monde réel, comme aller chez le médecin, vivre dans une famille et appeler un super-héros pour résoudre un problème !

Le jeu d’imitation permet aux enfants de développer des compétences de contrôle des impulsions et de résolution des conflits. En adhérant aux idées de certains personnages qu’ils se créent et en interagissant avec eux, ils s’entraînent à se confronter aux différentes situations qu’ils rencontreront dans la réalité. Le jeu d’imitation peut se faire avec n’importe quel objet, que ce soit une mallette de docteur, un poupon, des Legos, des figurines, etc.

L’enfant utilise l’objet pour représenter autre chose. Cette forme de jeu est souvent utilisée à des fins thérapeutiques auprès d’enfants lorsqu'ils ne sont pas en capacité de verbaliser leurs pensées et leurs émotions. C'est, pour les enfants, un moyen sûr et sécurisé de projeter leurs pensées et leurs sentiments vulnérables sur un autre sujet.

Quelques exemples : Les poupées traditionnelles (Petitcollin) ou en tissu (Nanchen), les marionnettes, les malettes du docteur et autres professions ou hobbys (Jabadabado), la dînette…

Le jeu physique

Comment le jeu physique favorise-t-il l’apprentissage ? Nombreuses sont les études à avoir démontré l’importance du jeu physique sur le développement des enfants. Au-delà de la psychologie, des recherches neurologiques ont mis en lumière les bénéfices de l’activité physique sur le bien-être.

En effet, s'engager dans un jeu physique augmente le flux sanguin et l'oxygénation dans le cerveau. Ce processus stimule la connectivité neuronale et la croissance des cellules nerveuses dans l'hippocampe, centre d'apprentissage et de mémoire. L'exercice modifie donc la structure de notre cerveau, avec un certain nombre d'avantages : amélioration de l'attention et de la mémoire, augmentation de l'activité cérébrale et des fonctions cognitives, et amélioration de l'humeur et de la capacité à faire face au stress.

Ainsi, au-delà des activités sportives encadrées, le jeu physique signifie tout simplement mettre son corps en mouvement, que ce soit en courant, à vélo, en trottinette, en nageant, en se défoulant tout simplement. 

Quelques exemples : les planches d’équilibre Wobbel, les chariots trotteurs (Plan Toys), les jouets à traîner (Vilac), les jeux de société (Gymanimo de Bioviva)

Jeu coopératif

Une fois que les enfants ont passé le stade du jeu seul et sont prêts à interagir en coopération les uns avec les autres, ils commencent à jouer ensemble. Le jeu de société est un excellent exemple de jeu coopératif et offre des tonnes de possibilités pour développer les muscles de résolution des problèmes, de communication et de résolution des conflits de votre enfant.

Quelques exemples de jeux coopératifs : Bioviva (Playa playa, Sauve Moutons), Londji (Cluck Cluck)

Le jeu permet aux enfants de développer une relation à soi, aux autres et au monde qui est fondamentale. Néanmoins, faute d’être classifiées dans des compétences techniques et de pouvoir être évaluées, ces compétences émotionnelles indispensables sont souvent relayées comme étant dispensables, au profit des compétences techniques ou académiques.

Ces quelques propositions de jeux ne sont que des exemples face à l’infini possibilité qu’ont les enfants de se créer leur propre jeu. C’est dans ces moments qu’ils déploient aussi toute leur créativité et leur imagination. L’imagination et la créativité sont de véritables trésors naturels que possède chaque enfant et qu’il est si difficile de retrouver en tant qu’adulte. Alors que nous, les adultes, utilisons toutes formes de méthodes pour stimuler notre créativité, les enfants l’ont naturellement en eux. Ainsi, en laissant les enfants jouer librement, nous nous assurons qu’ils conservent ce trésor le plus longtemps possible.

 

Sources : 

Pour aller plus loin :

Un dossier complet de l’académie de Caen sur les jeux et le développement des enfants : https://www.ac-caen.fr/dsden50/circo/cherbourgouest/sites/www.ac-caen.fr/dsden50/circo/cherbourgouest/IMG/pdf/jouer_jouerapprendre_dvlpt_enfant.pdf

Un article sur les bienfaits du jeu d’imitation dans le développement des enfants.

https://lesprosdelapetiteenfance.fr/eveil-activites/jouer-pour-grandir/le-processus-dimitation-chez-lenfant-passe-par-le-jeu/le-jeu-dimitation-determinant-dans-le-developpement-de-lenfant

Un dossier de l’académie de Grenoble sur l’historique des chercheurs dans le développement de l’enfant et des théories développées par chacun.e d’entres elles et eux.

http://www.ac-grenoble.fr/ecole/74/maternelle74/IMG/pdf/le_role_du_jeu_dans_le_developpement_de_l_enfant_ageem2.pdf

Littérature jeunesse : Youpi je m’ennuie, de Shinsuke Yoshitabe. Ce livre joyeux et amusant décrypte les vertus de l’ennui à travers l’histoire d’un petit garçon qui expérimente l’ennuie et par là même sa créativité et sa gratitude pour les moments où il s’amuse. Un livre publié aux éditions p’tit Glénat.

« On parle souvent du jeu comme s'il s'agissait d'un soulagement d'un apprentissage sérieux. Mais pour les enfants, le jeu est un apprentissage sérieux. Le jeu est vraiment l'œuvre de l'enfance. » Fred Rogers.